CRAYONS DE GUERRE - du 16 JANVIER 2015 (J+2221 après le vote négatif fondateur)

Les habitants de la  petite ville d’Hoenheim dans la banlieue nord de Strasbourg ont pu voir mardi dernier après-midi, sur la place devant la mairie, leur sapin retaillé en « crayon géant » puis « érigé » de nouveau.  C’est du moins ce que nous apprennent les Dernières Nouvelles d’Alsace en ces termes : « Mardi après-midi, un crayon géant a été érigé devant la mairie de Hoenheim en hommage aux victimes de l’attentat de Charlie Hebdo le 7 janvier dernier ». L’article ne précise pas toutefois si, lors de cette nouvelle érection, le sapin a conservé ses boules de Noël.

http://www.dna.fr/edition-de-strasbourg/2015/01/15/un-crayon-pour-charlie

     Il semblerait, selon la rumeur, que nos amis alsaciens aient, depuis, fait école…

     Verra-t-on notre beau pays se couvrir ainsi d’obélisques de bois, comme autant de totems ou de fétiches ? Des psychanalystes de renom se penchent déjà sur cette éclosion de symboles phalliques, notre Ministre de l’Écologie prône le redémarrage du nucléaire en raison des prélèvements à prévoir dans nos forêts, enfin le bruit court chez Christiane qu’un emballement trop grand pour tous ces pals géants dressés, patibulaires, sur les places publiques pourrait chagriner Robert Badinter. Saisir le sens profond de tous les évènements qui se déroulent actuellement sous nos yeux n’est pas une mince affaire.

   Il ne s’agit plus là seulement de saisir le « sens » du vote fondateur qui se déroula dans nos murs il y a 2221 jours ; pour cela, nous avions l’expert qui va bien, mais à présent, c’est une autre paire de manches !

    À propos de manches, prévoir une augmentation de leur prix en raison de la spéculation sur les bois à tourner….Because  la production d’armes psychologiques, les crayons !

      On nous permettra de quitter un peu lâchement l’actualité immédiate pour faire un retour un siècle en arrière et nous replonger dans l’ambiance de la Grande Guerre, un peu oubliée ces temps-ci. Dans son ouvrage La Grande Guerre (Paris, Éditions La Découverte, 2010) André Loez rapporte l’existence, dans les sociétés civiles des pays belligérants,  d’un processus général désigné, selon Hélie Halévy, de « fabrication de l’enthousiasme », ce processus est entretenu par un « encadrement associatif, social et étatique ». André Loez nous révèle qu’en Allemagne « l’effort des civils [se] manifeste aussi à travers les « figures à clous », ces étranges monuments en bois en forme d’aigle, de croix ou de statue (celle d’Hindenburg à Berlin fait 12 mètres de haut), où chacun vient planter un clou patriotique préalablement acheté au profit d’une œuvre de guerre ». (p. 63)

    Les nouveaux obélisques résineux de nos places pourraient-ils voir, selon le même principe, des vagues de punaisages collectifs de dessins au profit de la production de crayons ?

   Citant Zieger, André Loez ajoute que « cette mobilisation des esprits a une dimension coercitive, illustrée par exemple aux  États-Unis, où l’Espionnage Act de juin 1917 permet d’interdire des publications tandis que le Committee on Public Information et ses 75000 orateurs déploient une active propagande ». Plus inquiétant.

   Mais un siècle après tout change…. Ou presque. Aux oubliettes à présent les Schneider, les Krupp et autres marchands de canons. T’es plus dans le coup Bertha ! La guerre se gagne à présent dans nos arsenaux de crayons d’où Claudi, qui a bonne mine, nous rapporte son image du jour !     

Avec nos petites ouvrières

Avec nos petites ouvrières

C.S. Rédacteur de Chantecler,

Auxonne, le 16 Janvier 2015 (J+2221 après le vote négatif fondateur)

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