LES BLÉS D’OR (2) - du 26 JUIN 2015 (J+2382 après le vote négatif fondateur)
26 juin 2015LES BLÉS D’OR (2) - du 26 JUIN 2015 (J+2382 après le vote négatif fondateur)
« Les maïs ne pousseront plus au Charmoy, mais en ville nous avons à présent une petite emblavure. Non pas, une bavure, grand-père ! Une petite em-bla-vure! Une pièce de blé si t’aimes mieux. Une petite emblavure en dur j’te jure, avec dorure, des épis d’or, un vrai trésor ! »
Ainsi commençait notre premier article intitulé « les blés d’or »
LES BLÉS D’OR - du 21 JUIN 2015
Cet article, nous avait transportés en pleine moisson. Celui d’aujourd’hui, « Les blés d’or (2)», nous conduira jusque dans le pétrin !
Chacun sait que notre bonne France est universellement célèbre pour son bon pain. Ah ! les miches du Père Jeanne, bien des vieux Auxonnais s’en souviennent ! Ils ne sont pas les seuls. Outre-Manche, Outre-Rhin, et même Outre-Quiévrin, jusque là-bas, on s’en souvient. C’est ainsi, qu’en pèlerinage, des navires sont venus pour croquer la bonne croûte et humer la bonne mie. Aux quais royaux ils ont accosté, déversant leurs cargaisons de panophiles au nombre desquels, quelques vénérables croûtons.
Au pied de la Porte Royale, les panophiles ont trouvé en chemin le pêcheur et sa barque, transportés là, sans doute, par le dernier tsunami. C’est que le climat change, mon gars ! « Ça mord pêcheur ? ». Pas mal, le pêcheur au milieu des fleurs ! Plus bath qu’à Honfleur !! T’as vu, il a ferré une raie au beurre !
Mais passées les deux casernes, c’est le moissonneur doré sur tranche (de pain) qui a recueilli tous les suffrages. Devant les beaux épis mûrs à haute valeur boulangère ils salivaient déjà et c’est l’eau à la bouche qu’ils ont enfilé… la rue Carnot. Dans cette rue, ci-devant rue d’Artois, ce sont les miches dorées du Père Jeanne qu’ils venaient chercher.
Elles ont vécu, hélas, les miches du Père Jeanne ! Voilà l’élégie que j’aurais voulu leur chanter, quand je les ai vus en arrêt, tout dépités, devant la vitrine du 15, que le bon pain avait déserté depuis bien des années. Seule subsistait, conservée en souvenir du patrimoine, la belle gerbe d’or au fronton. Un Flamand en révolution et tout rouge de consternation m’a déclaré qu’il irait, s’il le fallait, jusqu’à Versailles, chercher la boulangère et le petit mitron !
Mais à Versailles, de la boulangère viennoise qui perdit la tête, il ne trouvera plus, que le Dirty Corner, cette œuvre récemment vandalisée, dont on a beaucoup parlé dernièrement dans les milieux de la culture.
Las ! La boulangère viennoise perdit jadis la tête sous le rasoir national, et à présent la boulangerie du Père Jeanne n’est plus, d’autres encore ont disparu. La boulangère n’a plus d’écus, et l’épicière, fut-elle une sorcière, n’en rentre plus guère. Le petit commerce est dans le pétrin, chacun le sait bien, depuis que l’on construit sur les champs de blé ces grandes boutiques qui gobent les centres-villes.
Les maïs ne pousseront plus au Charmoy, mais en ville nous avons à présent pour nous consoler une petite emblavure d’acier et une belle gerbe d’or sur la tombe d’une boulangerie défunte. Le monde est à l’envers, il finira un jour par perdre le goût du pain ! Alors, au Charmoy, tous en chœur, nous croquerons artistement des radis par la racine !
Gerbe d’antan
Or en javelle
Plus de cent ans
Tu nous rappelles.
Au four, le feu de bois
Cuisait la miche
Pour tous, un mets de roi
Pauvres et riches.
Mais aujourd’hui
La braise est noire
Du feu enfui
Avec ta gloire.
Bouquet d’épis dorés
Triste relique
De ces temps oubliés
Si pathétique.
C.S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 26 juin 2015 (J+2382 après le vote négatif fondateur)