CHARMOY-CITY : PAR BONHEUR, L’ONCLE MACQUART N’AVAIT PAS DE PANHARD - du 20 janvier 2018 (J+3321 après le vote négatif fondateur)
20 janv. 2018CHARMOY-CITY : PAR BONHEUR, L’ONCLE MACQUART N’AVAIT PAS DE PANHARD - du 20 janvier 2018 (J+3321 après le vote négatif fondateur)
La saga des Rougon-Macquart d’Émile Zola se déroule sur un cycle de vingt romans, de La fortune des Rougon (1871) au Docteur Pascal (1893) en passant par L’Assommoir (1877) et Germinal (1885).
C’est au Docteur Pascal que nous emprunterons l’argument de notre article, de pure fantasy, non sans avoir rappelé au préalable les préoccupations hygiénistes autour de l’hérédité qui sous-tendent les romans naturalistes de Zola, au premier chef desquelles le problème social de l’alcoolisme.
Posons le décor de la scène du roman qui nous intéresse. L’été à la campagne, la charmante propriété des Tulettes de l’Oncle Macquart, épicurien et solide buveur de 84 ans, oncle du Docteur Pascal. Le docteur arrive en visite chez son oncle accompagné de sa nièce Clotilde et du petit Charles. Ils trouvent la porte du vestibule grande ouverte et, geignant sur le seuil, le chien du maître des lieux. Où est donc passé l’Oncle Macquart ?
Laissons la parole à Zola :
« Pascal, envahi d’une crainte, ne put retenir l’appel inquiet qui lui montait aux lèvres.
‒ Macquart !...Macquart !
Personne ne répondit, la maison gardait un silence de mort avec sa seule porte grande ouverte, qui creusait un trou noir. Le chien hurlait toujours.
Et il s’impatienta, il cria plus haut :
‒ Macquart !...Macquart !
[…] Peut-être l’oncle dormait-il »
Cependant, ayant poussé la porte de la cuisine, Pascal est suffoqué par une atroce odeur de brûlé. Il ouvre les volets et le spectacle qu’il découvre l’emplit d’étonnement
« Chaque objet se trouvait à sa place ; le verre et la bouteille de trois-six [N.D.L.R. : alcool très fort, à environ 80° G.L.] vide étaient sur la table ; seule la chaise où l’oncle avait dû s’asseoir, portait des traces d’incendie, les pieds de devant noircis, la paille à demi brûlée. Qu’était devenu l’oncle ? Où donc pouvait-il être passé ? Et, devant la chaise, il n’y avait, sur le carreau, taché d’une mare de graisse, qu’un petit tas de cendre, à côté duquel gisait la pipe, une pipe noire, qui ne s’était pas même cassée en tombant. Tout l’oncle était là, dans cette poignée de cendre fine […]
« C’était le plus beau cas de combustion spontanée qu’un médecin eût jamais observé. Le docteur en avait bien lu de surprenants, dans certains mémoires, […]. Lui-même, jusque-là, s’était méfié, n’avait pu admettre, comme les anciens, qu’un corps, imprégné d’alcool, dégageât un gaz inconnu, capable de s’enflammer spontanément et de dévorer la chair et les os. Mais il ne niait plus, il expliquait tout d’ailleurs, en rétablissant les faits : le coma de l’ivresse, l’insensibilité absolue, la pipe tombée sur les vêtements qui prenaient feu, la chair saturée de boisson qui brûlait […] » (Émile Zola, Le Docteur Pascal, Paris, Charpentier, 1893, pp. 231-232)
Comme dit Zola « C’était le plus beau cas de combustion spontanée qu’un médecin eût jamais observé ». Combustion spontanée. À la différence de Jeanne la Pucelle, l’oncle Macquart avait donc pris feu tout seul, autrement dit spontanément.
Par bonheur l’oncle Macquart n’avait pas de Panhard ! Passe pour la combustion « spontanée » de l’oncle Macquart, mais imaginez un peu la combustion « spontanée » de sa Panhard ! Zola n’avait pas prévu ça !
C.S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 20 janvier 2018 (J+3321 après le vote négatif fondateur)
Publié dans Figures libres