AUXONNE, CŒUR D'ACIER (1) - du 11 décembre 2023 (J+5472 après le vote négatif fondateur)
11 déc. 2023AUXONNE, CŒUR D'ACIER (1) - du 11 décembre 2023 (J+5472 après le vote négatif fondateur)
Un article pleine page vient de paraître dans Le Bien Public papier du 9 courant sous le titre : « AUXONNE Le site des anciennes aciéries est à vendre : plusieurs pistes à l'étude ».
L'importance et la complexité des questions d'aménagement qui y sont développées nous amènent à interrompre momentanément notre Voyage dans l'Empire de l'authenticité dont nous avions déjà rendu compte de la première étape dans notre précédent article.
D'AUXONNE À DOLE : VOYAGE DANS L'EMPIRE DE L'AUTHENTICITÉ (1) - du 8 décembre 2023
Et que nous ne manquerons pas de reprendre après le second épisode d' AUXONNE, CŒUR D'ACIER
En vertu de l'adage « cordonnier, pas plus haut que la chaussure » nous ne nous livrerons pas à une quelconque analyse de l'article du Bien Public précité, laissant ce soin à nos élus municipaux, communautaires et départementaux compétents.
Notre rédaction a néanmoins jugé opportun d'offrir à ses concitoyens un aperçu historique de ces aciéries qui animèrent pendant près d'un siècle le paysage industriel de notre ville
En déclin inéluctable depuis plusieurs décennies, les Aciéries d’Auxonne fermaient définitivement leurs portes le 30 novembre 2004.
Dans les décennies de l’après-guerre, l’établissement employait de nombreux ouvriers, cadres et employés. Un grand nombre d’entre eux habitaient dans le quartier de l’actuelle rue de Labergement et à la Brasserie (rue Colonel Denfert). Les vieux Auxonnais se souviennent de la sirène de l’usine qui rythmait les journées.
Je me souviens avoir visité l’usine dans mon année de CM2 (1955-56) avec notre maîtresse Madame Marchand qui nous y avait bien préparés. Je me souviens du cubilot pour réchauffer et fondre les gueuses de fonte avant le passage du métal liquide au convertisseur Bessemer pour affinage en acier. Je me souviens de la lumière éblouissante du métal en fusion.
À la fin de chaque cycle d’affinage, le Bessemer crachait sur le ciel de la ville ses étincelles et son nuage rouillé. Inimaginable en notre époque écologique !
Et ne parlons pas de la silicose provoquée avant-guerre par la « dessableuse » (le dessablage consiste à nettoyer les pièces moulées au sable, après démoulage, par un jet de sable). Je me souviens, enfant, avoir côtoyé un retraité de la fonderie bien amoché, connaissance de mes parents, et qui peinait à respirer.
Par la suite, l’affinage Bessemer fut abandonné, remplacé par l’affinage au four électrique donnant des aciers de qualité aux nuances plus subtiles et beaucoup mieux définies.
C’était encore un plaisir pour moi de conduire, dans les décennies 1980-90, mes élèves aux Aciéries pour y voir l’affinage et la coulée au four électrique.
La sidérurgie m’a toujours impressionné, c’est un métier de titan ! J’ai même enseigné la métallurgie en Alsace, dans mon premier poste au Lycée Technique Nationalisé Mixte de Guebwiller.
Quelques années passées ensuite en poste au Creusot, le pays des Schneider (on disait Schneidre) et du marteau-pilon, au début des années 1970, furent pour moi un vrai régal de sidérurgie !
C’est en quelque sorte, un « petit Schneidre » qui créa et dirigea les Aciéries et Fonderies d’Auxonne inaugurées en 1918 sur un site contigu de la voie ferrée Dijon-Dole et incluant des éléments de l'enceinte fortifiée d'Auxonne.
Toussaint Levoz, le premier directeur de ces aciéries est issu d’une grande famille bourgeoise liégoise. Au début du siècle dernier, cet ingénieur-métallurgiste, d’une grande réputation dans le milieu de la sidérurgie, était Chef des Services des Aciéries et Forges de Stenay (Meuse).
La réputation de Toussaint Levoz était liée à son procédé de production de pièces d’acier moulé, procédé beaucoup plus économique que le forgeage.
On lit ainsi à propos de la fonderie de Colombier-Fontaine (Doubs) : « Pour son plus grand profit, elle est équipée en 1915 par Toussaint Levoz, expert de réputation internationale, avec des convertisseurs Bessemer à soufflage latéral. Munie de cet appareil, la voici apte à produire des garnitures de mitrailleuses en acier ou en fonte coulée. Jusqu’alors, de telles pièces étaient forgées ou estampées. Les concurrents qui s’étaient essayés à couler l’acier pour ces pièces, à l’image d’Arbel, n’y étaient pas arrivés. En quelques mois, plusieurs dizaines de milliers de garnitures vont sortir de Colombier-Fontaine. L’armée française se procure ainsi les mitrailleuses qui lui font défaut. Colombier-Fontaine fabrique également des affûts pour canons anti-avions. L’entreprise vit une période de prospérité. » ( Source : Olivier Boudot, D’AFE à Safe Naissance d’un champion mondial, Mémoires d’hommes, histoires d’entreprises)
Quelques années auparavant, un autre membre de la famille Levoz, Eustache Levoz avait redressé la situation de la fonderie d’acier d’Outreau (Pas-de-Calais)
« De 1902 à 1907, les résultats techniques de la fonderie d’acier d’Outreau ne sont pas bons. Il semble que cela tienne au fait de l’absence à Outreau d’un spécialiste du moulage de l’acier, […] La crise éclate. Les « responsables » remerciés, un nouveau chef de service de l’aciérie est engagé : Eustache Levoz qui pratique le métier depuis vingt ans […] Levoz redresse la situation. » (Source : Edmond Truffaut, Métallurgie en Boulonnais, Éditions A.M.A./Histopale)
Dans les dernières décennies du vingtième siècle l'établissement devait toutefois connaître un rapide déclin qui entraîna sa liquidation judiciaire et son démantèlement en 2004.
S'ensuivirent sur le site déserté divers squatts, incendies et autres déprédations.
Une partie du site métallurgique s'étendant sur environ trois hectares et contigu du magasin Intermarché était finalement acquis par l' Immobilière Européenne des Mousquetaires vers le milieu des années 2010.
Et la démolition de l'usine était entamée à partir de la fin 2019.
Pour les fanas Napo nous proposons en PDF la première partie d'un article des années 1950 qui parle et des Aciéries et de Bonaparte. À la bonne heure ! (la suite au prochain numéro)
Claudi a ressuscité les Aciéries d'après une carte postale d'avant-guerre.
C.S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 11 décembre 2023 (J+5472 après le vote négatif fondateur)
Publié dans Revue de presse